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COVID-19

Publié le  Lecture 19 mins

Vaccination contre le SARS-CoV-2 : que savons-nous ?

Véronique GODOT, Université Paris-Est Créteil ; VRI (Vaccine Research Institute), Créteil - vaccine-research-institute.fr

Avec presque deux millions de morts dans le monde et un nombre de cas qui ne cesse d’augmenter, la vaccination anti-SARS-CoV-2 est la seule opportunité tangible, via l’immunité de groupe, de bloquer la pandémie de la Covid-19 et de retourner à une vie « normale ». Mieux connaître et comprendre les types de vaccinations possibles permet de prendre part à ce débat sanitaire pour nos patients, nos proches et nous-mêmes. La première partie, plus fondamentale, revient sur les mécanismes de réponse immunitaire au cours d’une vaccination. Il décrit ensuite les différents types de vaccination (ARN, protéines…), les vecteurs utilisables (lipides, adénovirus…) et la nécessité ou non d’adjuvants, ainsi que leurs effets sur l’immunité. La deuxième partie s’intéressera aux différents types de vaccin anti-SARS-CoV-2 déjà à disposition et à leur efficacité clinique. Enfin un aperçu des vaccins à venir clôturera ce chapitre. Pour finir, la troisième partie de l’article reprend les indications de la vaccination, l’efficacité attendue sur les variants et le retour de la pharmacovigilance en France.

Colas TCHÉRAKIAN

Rappels généraux sur la réponse immunitaire anti-infectieuse et l’historique de la vaccination Une réponse immunitaire en deux étapes Au cours de l’histoire naturelle d’une infection microbienne, qu’elle soit d’origine virale ou bactérienne, l’intrus est rapidement détecté par notre système immunitaire. La rencontre aboutit à l’activation des cellules de l’immunité innée en première ligne. Les neutrophiles, les monocytes/macrophages et les cellules dendritiques phagocytent le pathogène selon des modalités intrinsèques. Ils l’encerclent, l’avalent et le digèrent afin de circonscrire l’infection. C’est une course comme la montre qui s’engage entre les virus et les bactéries dont la croissance ou prolifération est rapide et nos cellules immunitaires innées. La réponse immunitaire adaptative se met en place lorsque notre immunité innée est dépassée et ne parvient pas à juguler l’infection. L’immunité innée passe en quelque sorte le relais à une deuxième ligne de défense, les lymphocytes T (CD4 et CD8) et B dont la force de frappe est plus chirurgicale. L’activation et la prolifération des lymphocytes capables de reconnaître l’intrus prend plusieurs jours, entre une et deux semaines selon le type cellulaire. Pendant ce laps de temps, l’intrus prolifère et inflige des dégâts à notre organisme. C’est ce délai que cherchera à raccourcir la vaccination. Après leur activation, les lymphocytes T CD4 (ou T4) produiront des médiateurs solubles, véritables guides et potentialisateurs des réponses immunitaires. Les lymphocytes B sous l’action de ces guides produisent des anticorps aux pouvoirs neutralisants ou opsonisants. Les premiers se fixent sur les virus et empêchent leur entrée dans nos cellules. Les seconds recouvrent le pathogène et le rendent plus visibles pour nos cellules phagocytaires. L’intrus est ainsi détruit plus rapidement. Les lymphocytes T CD8 (T8) antiviraux éliminent nos cellules infectées et limitent ainsi la propagation des virus (figure 1). Figure 1. Rappels généraux sur la réponse immunitaire anti-infectieuse. Une réponse immunitaire en deux étapes. Après la résolution de l’infection et une phase de réparation, notre organisme conserve une fraction de lymphocytes T et B mémoires. Ces cellules mémoires seront capables de reconnaître le même intrus lors d’une nouvelle infection. Ils seront plus rapidement activés et fonctionnels qu’au cours de la première rencontre. Notre organisme gagne un temps précieux dans la lutte anti-infectieuse grâce à cette propriété anamnestique des lymphocytes. La vaccination consiste à générer des lymphocytes T et B mémoires anti-infectieux à faible coût pour notre organisme. Elle aide notre organisme à réagir rapidement en cas d’infection et limite ainsi la propagation des virus ou bactéries et les dégâts causés par l’infection. Historique de la vaccination et mécanismes déclenchés par les différents modes vaccinaux Il faut au cours de la vaccination reproduire l’histoire naturelle de la maladie infectieuse et aboutir à l’activation des lymphocytes mémoires sans pour autant déclencher une maladie. Plusieurs stratégies permettent de « débarrasser » les produits microbiens contenus dans les vaccins de leur pouvoir pathogène (figure 2). Figure 2. Les différentes catégories de vaccins. Vaccination par micro-organismes vivants atténués : une réponse puissante et persistante Le vaccin ROR est composé de virus vivants atténués de la rougeole, des oreillons et de la rubéole. Le BCG, le vaccin antivariolique, les vaccins contre la fièvre jaune et les rotavirus utilisent également des virus vivants atténués. Cette première approche a l’avantage d’être très immunogène (active de fortes réponses immunitaires) mais est déconseillée chez les personnes immunodéprimés. Autre inconvénient, l’atténuation d’un pathogène est un processus long obtenu après des transferts successifs du pathogène dans des hôtes autres que l’être humain. Le virus mute pour s’adapter à son nouvel hôte. Il conserve sa capacité de réplication mais perd sa virulence. Le revers de la médaille est que ces microorganismes sont de fait contre-indiqué chez l’immunodéprimé, car ces pathogènes atténués peuvent donner d’authentiques maladies s’ils ne sont pas contrôlés par le système immunitaire. Vaccination par micro-organismes inertes et fragments protéiques : faciles à produire, sans risque mais moins immunogènes L’essor de la microbiologie et l’identification des agents pathogènes a fait progresser la vaccinologie vers le développement de vaccins inertes composés de pathogènes tués. Le vaccin contre la poliomyélite et le vaccin contre l’hépatite A sont des exemples de vaccins « inactivés ». Ils induisent des réponses immunitaires moins fortes que les vaccins « vivants atténués » mais leur production est plus aisée. Des injections de rappel de ces vaccins tués sont nécessaires afin de maintenir (de conserver) le pool de lymphocytes mémoires. Une nouvelle étape décisive dans la vaccinologie est marquée par l’avènement du génie génétique et notre capacité à produire de façon illimitée des fragments microbiens identifiés en amont comme étant des cibles préférentielles de notre système immunitaire. Des vaccins à sous-unités protéiques sont ainsi produits comme le vaccin contre l’hépatite B composé de protéines de surface du virus, le vaccin contre les infections à papillomavirus humain ou encore le vaccin conjugué antipneumococcique qui associe un polysaccharide (glucide) bactérien et une protéine. La synthèse artificielle des sous-unités microbiennes ou antigènes microbiens utilise des systèmes d’expression comme des cellules d’insectes, des levures dans lesquelles nous introduisons le gène codant pour le fragment microbien sous le contrôle de systèmes adéquats. La protéine est ensuite produite en grande quantité puis purifiée avant d’être utilisée dans la composition des vaccins. La vaccination à ADN ou ARN On fournit le plan pour la production de la protéine du pathogène, notre corps fait le reste. Une production industrielle rapide, une réponse immunitaire personnalisée mais le choix du transporteur d’ARN/ADN est crucial et la conservation compliquée. Dans la vaccination à ADN ou à ARN (vaccins à acides nucléiques), l’étape d’expression de l’antigène microbien s’effectue directement dans les cellules de l’organisme vacciné après l’inoculation du gène codant l’antigène avec son système de régulation. • Quels avantages à l’utilisation d’ARNm ? Une partie de l’avantage de la vaccination ARNm repose de la découverte des récepteurs Toll-Like ou TLR. Cette découverte a fait l’objet du prix Nobel 2001 attribué au Français Jules Hoffmann et à l’Américain Bruce Beutler. Ces récepteurs reconnaissent des motifs moléculaires présents dans le génome des pathogènes, en particulier le TLR7 et le TLR8 sont spécifiquement activés par les virus à ARN monocaténaire (comme le SARS-CoV-2) et les ARN messagers synthétiques (vaccination ARN). L’activation directe de ces TLR par l’ARNm du pathogène va entraîner une stimulation des cellules initiant la réponse immunitaire (les cellules dendritiques) à la façon d’un adjuvant « naturel » et déclencher ce que les immunologistes appellent un signal de danger. De plus l’ARNm une fois introduit dans la cellule va permettre la production d’une protéine virale (et non du virus en entier), que votre cellule va découper en petit morceaux, morceaux présentés ensuite au système immunitaire (les lymphocytes CD8+). L’avantage ici est que votre organisme choisit le morceau de protéine qui lui semble le plus efficace pour s’immuniser. Lorsqu’on vous vaccine avec des peptides exogènes, on choisit pour vous les morceaux qui conviennent à la plupart des individus, c’est moins personnalisé. • Comment transporter le gène viral dans nos cellules ? Toute la difficulté est d’emmener le gène dans votre cellule en entier et fonctionnel. Car votre organisme essaie justement de se débarrasser des ARN étrangers pour éviter de se faire infecter. Le gène à inoculer peut être véhiculé dans nos cellules soit à l’aide de vecteurs viraux non virulents, soit de vecteurs lipidiques. Le vaccin contre Ebola utilise le virus de la stomatite vésiculaire (VSV) rendu inoffensif dans lequel est inséré le gène (ADN) codant la glycoprotéine d’enveloppe d’une souche du virus afin de transporter le gène dans nos cellules. Les vésicules lipidiques quant à elles pourront fusionner avec les lipides de notre membrane cellulaire et déverser l’ARN dans la cellule. • La vaccination à ARN contre la Covid-19 Il n’y a pas de précédent dans la vaccination à ARN, à l’échelle industrielle, en dehors de la vaccination contre la Covid-19. C’est l’ARN codant la protéine spike (S) du virus SARS-CoV-2 qui a été sélectionné dans ces vaccins. Cette protéine S est la clef qui permet au virus SARS-CoV-2 de pénétrer dans nos cellules afin de produire de nouvelles particules virales. Elle est la cible préférentielle des premiers vaccins produits contre la Covid-19. Ici l’objectif est d’activer, dans l’organisme vacciné, la production d’anticorps dirigés contre la protéine S virale. L’inconvénient de ces vaccins à ARN est leur mode de conservation à des températures très basses, -20°C ou -70°C selon le type de vaccin. À ce jour, trois vaccins contre la Covid-19 ont obtenu une autorisation de mise sur le marché en France par l’ANSM (l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé). Il s’agit des vaccins à ARN (indiqués dans le texte par ordre alphabétique) Comirnaty (de Pfizer et BioNtech) et Moderna COVID-19 mRNA (produit par la firme éponyme Moderna) et du vaccin AstraZeneca/ChAdOx1-S fruit d’une collaboration entre AstraZeneca et l’université d’Oxford (Royaume-Uni). Le choix des deux premières firmes s’est porté sur l’utilisation de vecteurs lipidiques pour encapsuler l’ARN, tandis qu’AstraZeneca utilise un vecteur viral (un adénovirus du chimpanzé non réplicatif) qui renferme le gène codant la protéine S du virus SARS-CoV-2. Ces particules

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