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Pneumologie

Publié le  Lecture 12 mins

Diagnostic radiologique de la fibrose pulmonaire idiopathique

Marie-Pierre DEBRAY, Service de radiologie, hôpital Bichat, Paris

L’imagerie tient une place importante dans le diagnostic des fibroses pulmonaires, dont les aspects varient selon les différentes entités. La fibrose pulmonaire idiopathique constitue la plus grave d’entre elles. L’enjeu thérapeutique représenté par l’efficacité des antifibrosants et la nocivité des immunosuppresseurs, utilisés dans d’autres fibroses, la place au cœur de la démarche diagnostique. L’identification d’un aspect de pneumopathie interstitielle commune au scanner permet d’en poser le diagnostic lorsque la présentation est idiopathique.

La fibrose pulmonaire idiopathique (FPI) est la forme la plus fréquente de pneumopathie interstitielle diffuse (PID) idiopathique chronique chez l’adulte. Elle est définie par un aspect de pneumopathie interstitielle commune (PIC) en anatomopathologie et l’exclusion de toutes causes connue de PID. Son diagnostic est important car, malgré un pronostic sombre, des traitements antifibrosants spécifiques permettent d’en ralentir l’évolution, alors que des traitements utilisés dans d’autres fibroses peuvent être délétères. La place du scanner thoracique est centrale. Son rôle consiste principalement à reconnaître, avec des degrés de confiance variables, un aspect de PIC, et identifier d’éventuelles atypies amenant à proposer des diagnostics différentiels. Il est important de distinguer l’aspect en scanner ou en anatomopathologie du diagnostic de la maladie, qui intègre les données cliniques et biologiques. Il existe en effet des formes secondaires de PIC, dans le cadre d’expositions environnementales, professionnelles, médicamenteuses ou de connectivites, dont l’aspect scannographique n’est le plus souvent pas distinguable de celui de la FPI, mais dont le diagnostic est une fibrose non FPI. Ainsi le scanner ne permet de poser un diagnostic de FPI que lorsque l’ensemble des données cliniques et biologiques a écarté une forme secondaire. Critères diagnostiques de pic en scanner Les recommandations internationales pour le diagnostic de la FPI, actualisées en 2018 (1), incluent des critères d’imagerie permettant de classer l’aspect scanographique en 4 catégories (tableau 1), d’aspect de PIC, de PIC probable, d’aspect indéterminé pour une PIC ou d’aspect suggérant un diagnostic alternatif à la FPI. Ces critères d’imagerie combinent la présence ou l’absence de différents signes élémentaires, leur étendue, ainsi que la distribution lésionnelle globale, dans le plan axial et dans l’axe cranio-caudal. Le classement en l’une de ces 4 catégories requiert des examens de qualité optimale répondant à des critères techniques précis d’acquisition et de reconstruction (tableau 2). ° Les ossifications pulmonaires apparaissent comme de petites calcifications au sein des territoires de fibrose, elles sont rapportées plus fréquentes sur des lésions de PIC que sur des lésions de pneumopathie interstitielle non spécifique. * Signes orientant vers un aspect non PIC. ** Signes orientant vers une PID de cause secondaire (des plaques pleurales orientent vers une asbestose, une dilatation œsophagienne oriente vers une connectivite, des érosions claviculaires distales orientent vers une polyarthrite rhumatoïde, un épanchement ou un épaississement pleural orientent vers une connectivite ou une pneumopathie médicamenteuse). * À réaliser au cours du bilan initial, afin d’identifier un éventuel piégeage aérique, dont l’étendue peut constituer une atypie pour la PIC et orienter vers une PHS. ** À réaliser en cas d’hyperdensités en verre dépoli ou de réticulations en zones déclives, afin de faire la part entre d’authentiques anomalies interstitielles et de simples troubles ventilatoires liés à la déclivité. La présence de rayons de miel est nécessaire pour un classement en aspect de PIC. Il est défini par un regroupement de formations kystiques, de densité aérique, de siège typiquement sous-pleural. Les « kystes » de rayon de miel sont de taille variable, généralement de quelques millimètres dans les formes débutantes, pouvant atteindre quelques centimètres dans les formes évoluées. Leur distinction des lésions d’emphysème remanié par de la fibrose, décrit par les anatomopathologistes par l’acronyme AEF (Airways Enlargement with Fibrosis) peut être difficile, ce d’autant que celles-ci peuvent être associées aux rayons de miel. Typiquement, ces lésions d’emphysème remanié sont situées quelques millimètres à distance de la surface pleurale, plus fréquemment à hauteur de la partie apicale qu’à l’extrême base des lobes inférieurs, et leur paroi est plus fine que celle des rayons de miel. Ces derniers sont très souvent associés à des bronchectasies de traction et des réticulations. Les lésions prédominent dans les territoires sous-pleuraux. Elles sont habituellement de distribution hétérogène, disséminées selon l’axe cranio-caudal, avec une prédominance basale (figure 1). La présence de discrètes hyperdensités en verre dépoli, superposées à des zones de réticulations, n’est pas inhabituelle. Figure 1. Aspect de pneumopathie interstitielle commune. Réticulations et images en rayons de miel (flèches fines) à prédominance souspleurale et basale. Quelques bronchectasies de traction périphériques (flèche épaisse). Verre dépoli surajouté aux réticulations par endroits, d’étendue mineure. La distribution est hétérogène, certaines zones sous-pleurales apparaissant subnormales, d’autres étant le siège de réticulations, d’autres de rayon de miel. Il n’existe pas d’atypie. En l’absence de rayon de miel et en présence de réticulations et de bronchectasies de tractions périphériques, prédominant dans les territoires sous-pleuraux et basaux, l’aspect est classé « PIC probable » (figure 2). Comme dans l’aspect de PIC, de discrètes hyperdensités en verre dépoli peuvent être observées. Figure 2. Aspect de pneumopathie interstitielle probable. Réticulations de distribution prédominante sous-pleurale et basale. Bronchectasies de traction périphériques (flèches). Verre dépoli mineur surajouté. Absence d’atypie. En l’absence de bronchectasies de traction, l’aspect reste indéterminé (figure 3). Figure 3. Aspect indéterminé pour une pneumopathie interstitielle commune. Réticulations sous-pleurales peu étendues, à prédominance basale, sans signe de fibrose (absence de bronchectasie de traction, absence de rayon de miel) et sans autre anomalie suggérant un diagnostic alternatif. Des atypies peuvent orienter vers un autre diagnostic que la FPI. Il s’agit toujours d’atypies franches, de profusion sémiologique non mineure ou de distribution non univoque. Ce sont des hyperdensités en verre dépoli prédominantes, plus étendues que les réticulations, une micronodulation profuse, des kystes profus, des condensations prédominantes, un aspect en mosaïque extensif. Il peut s’agir également d’une distribution lésionnelle prédominant le long des axes bronchovasculaires, périlymphatique ou au niveau des régions supérieures et moyennes des poumons. Chacune de ces atypies peut faire discuter d’une gamme de diagnostics différentiels, mais c’est l’ensemble du tableau qui fera évoquer un diagnostic alternatif, le plus fréquemment de pneumopathie interstitielle non spécifique (PINS), de pneumopathie d’hypersensibilité (PHS), de sarcoïdose. Plus rarement, l’aspect fera évoquer une pneumopathie organisée, une fibro-élastose pleuro-parenchymateuse, une silicose, une pneumopathie interstitielle desquamative, une pneumopathie interstitielle lymphoïde. Lorsque la seule atypie est un verre dépoli prédominant et que la présentation est aiguë ou subaiguë, il faut toujours considérer un événement intercurrent, tel qu’une surcharge de cause cardiaque, une infection pulmonaire ou une exacerbation de fibrose. La PID devra être caractérisée à distance de cet épisode. En plus des signes d’atypie pour l’aspect de PIC, la classification de 2018 intègre dans ce groupe « autre diagnostic » des signes extrapulmonaires pouvant orienter vers une PID non FPI, telle qu’une connectivite, une asbestose ou, rarement, une sarcoïdose. On peut en rapprocher des aspects particuliers de PIC, à type de rayon de miel macrokystique pur ou d’atteinte limitée des bases pulmonaires sans extension aux régions supérieures, ayant été rapportés comme plus fréquents dans les PIC de connectivites (2) que dans la FPI. Dans certains cas, il existe des lésions de fibrose qui n’orientent ni vers une PIC ni vers un diagnostic alternatif de FPI. L’aspect est alors classé indéterminé. Un classement indéterminé dans la classification de 2018 recouvre ainsi des atteintes interstitielles peu étendues sans signe scannographique de fibrose (figure 3) et des aspects de fibrose pulmonaire sans orientation particulière (figure 4). Figure 4. Cavités irrégulières, images en rayons de miel et verre dépoli étendu. Prédominance lésionnelle basale et sous-pleurale. La présence de rayons de miel témoigne de lésions de fibrose mais le verre dépoli étendu, les cavités irrégulières sont atypiques pour une pneumopathie interstitielle commune sans pour autant évoquer un diagnostic alternatif. L’aspect est celui de fibrose pulmonaire sans orientation particulière. Signification des différents aspects scannographiques Un aspect de PIC au scanner permet de prédire avec une grande fiabilité une PIC en anatomopathologie, dans plus de 95 % des cas. Il permet ainsi, si la présentation clinique est idiopathique, de poser un diagnostic de FPI. Cet aspect n’est cependant observé que dans la moitié des cas de FPI. La signification d’un aspect de PIC probable dépend du contexte clinique. Lorsque la suspicion clinique de FPI est élevée (sexe masculin, âge supérieur à 60 ans, tabagisme et absence d’exposition ou de signe de connectivite), cet aspect permet également de prédire avec fiabilité une PIC en anatomopathologie, dans plus de 90 % des cas. En revanche, la probabilité de PIC en anatomopathologie reste incertaine si la suspicion clinique de FPI n’est pas élevée. Un aspect indéterminé dans sa forme « précoce », à type de simples réticulations et/ou hyperdensités en verre dépoli de distribution sous-pleurale et basale, peut témoigner d’une PIC débutante, mais également d’anomalies interstitielles d’autre nature, dont le caractère fibrosant n’est pas avéré. Il est particulièrement important devant de telles images de s’assurer qu’il ne s’agit pas de simples opacités liées à la déclivité, qui seraient sans signification pathologique, et de les confronter au retentissement clinique et fonctionnel. Un aspect indéterminé de fibrose sans orientation particulière peut correspondre à

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