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Allergologie

Publié le  Lecture 13 mins

L’enfant allergique en vacances

Guy DUTAU, Allergologue, pneumologue, pédiatre, Toulouse

Les vacances sont « le temps pendant lequel les études cessent dans les écoles, dans les collèges » (Littré). Cette mise au point, écrite sous la forme d’un abécédaire, concerne surtout les vacances d’été (juillet-août). Parmi les questions que l’on se pose figurent : les allergies sont-elles moins fréquentes en été ? La réponse est « non », l’allergie ne prend pas de vacances. Autre question : peut-on diminuer les traitements antiallergique et antiasthmatique pendant la vacances ? Les réponses sont individuelles, mais uniquement si l’affection est contrôlée.

MER Au bord de la mer, la question la plus fréquente est : « Mon enfant est allergique à l’iode, peut-il se baigner ? Peut-il manger des fruits de mer puisqu’ils contiennent de l’iode ? ». Réponse : l’allergie à l’iode (à l’atome d’iode) n’existe pas. Ce mauvais terme, employé par les patients et même par des médecins, désigne des symptômes variés, de mécanismes divers, dus aux produits iodés : désinfectants iodés (polyvidone iodée), produits de contraste iodés (PCI) (1). L’atome d’iode est naturellement présent dans l’air, le sol (les plantes) et l’eau (surtout les océans). On le trouve dans de nombreux aliments : algues, poissons, crustacés, soja, haricots verts, laitages, pain… L’allergique aux PCI n’a aucun risque à se baigner ni à consommer des fruits de mer ! Ce sont deux idées reçues. L’allergie aux poissons et fruits de mer se manifeste par les symptômes rapides (de quelques minutes à moins de 3-4 heures après l’ingestion : allergie orale, urticaire généralisée, rhinite, asthme, anaphylaxie (2,3)). Elle est beaucoup plus fréquente avec les poissons ou les crustacés qu’avec les mollusques marins. Le diagnostic est porté par l’histoire clinique, les prick-tests (PT) et les dosages d’IgE sériques spécifiques (IgEs). Les autres risques de la mer sont le soleil (allergie solaire), les méduses, les vives, etc. MONTAGNE En montagne (au-dessus de 1 000-1 200 mètres), la saison des graminées est décalée par rapport à la plaine, plus courte (fin juin et juillet), mais aussi intense. En août, les risques sont limités. En juillet, en montagne, il faut continuer le traitement préventif (anti-H1 per os ou par voie oculaire, ou corticoïdes par voie nasale) (4). Chez les allergiques aux pollens, il faudrait préférer le mois d’août pour les vacances en montagne. Il existe des cas d’anaphylaxie (Alpine slide anaphylaxis) chez des personnes s’adonnant à un sport de glisse d’été (5). Ces patients furent soupçonnés d’avoir une allergie, facilitée par des écorchures avec pénétration des pollens des herbes auxquels ils étaient sensibilisés, adhérant aux pistes. D’autres cas identiques ont été décrits (6) ou après contact avec les allergènes des herbes sur peau abrasée ou non (voir abécédaire) (7-9). FORÊT Les chenilles processionnaires du pin (Thaumetopoea pityocampa) font partie des 150 espèces de Lépidoptères capables d’entraîner des allergies (a). Elles sont recouvertes de poils urticants, chacun d’eux étant relié à une glande à venin. Celui-ci est libéré lorsque le poil est fragilisé ou se casse, ce qui provoque une nécrose tissulaire prurigineuse. Les poils urticants, infestant les nids des chenilles, sont dispersés et tombent sur les promeneurs ou les travailleurs forestiers. Les symptômes touchent la peau (prurit, urticaire), les yeux (conjonctivite), la sphère ORL (rhinite) et les bronches (crises d’asthme). Des anaphylaxies ont même été décrites. Un allergène majeur a été isolé dans les poils (une protéine de PM 15 kDa) détectée dans l’atmosphère au même titre que les grains de pollens ou les spores de moisissures (10). Les mécanismes sont l’allergie immédiate IgE-dépendante, l’action irritante des poils, ou les deux à la fois. En Espagne, sur 55 individus, forestiers ou promeneurs en forêt au cours des 24 heures précédentes qui présentaient des symptômes respiratoires (rhinite, toux, asthme) et/ou oculaires (conjonctivite), les PT à un extrait de T. pityocampa furent positifs chez 32 d’entre eux (58,2 %) (11). Plusieurs cas gravissimes ont été rapportés, en particulier celui d’un nourrisson placé sous un arbre pour la sieste (12). Une chenille tomba et s’introduisit dans sa bouche causant un syndrome asphyxique avec nécrose de la langue (b). Conseils : I) ne jamais toucher ces chenilles, II) ne pas marcher les pieds nus, III) ne pas se placer sous un arbre infesté. Dans le cadre de l’ONF (Office national des forêts), la chenille processionnaire du chêne (Thaumetopea processionaria) est reconnue comme cause de maladie professionnelle chez les personnes exposés directement ou indirectement durant leur activité (13). En août, en forêt, il faut aussi se méfier des fourmis, des aoûtats, de certaines guêpes de terre, et des moisissures (Alternaria) (voir abécédaire). ABÉCÉDAIRE • Aliments. Les repas au restaurant font parfois courir un risque d’intoxication, mais aussi d’allergie alimentaire (AA). Le choc histaminique est dû à la consommation de poissons bleus (thon, sardines, etc.) après rupture de la chaine du froid (1). Sous l’action des bactéries, l’histidine de la chair des poissons se transforme en histamine. Le tableau ressemble à une AA au poisson, mais il existe des cas groupés ou successifs venant du même restaurant. Les PT aux poissons sont négatifs. • Allergie solaire. Le terme médical est lucite estivale bénigne, éruption déclenchée par les rayons solaires, le plus souvent chez les jeunes femmes, dès les premières expositions solaires. L’éruption prurigineuse se situe sur le décolleté et les bras. Elle récidive, mais diminue ou disparaît le plus souvent quand la peau brunit. Traitement symptomatique : application locale de dermocorticoïdes, anti-H1. Prévention : photoprotection. • Animaux. L’été est une période propice pour le contact avec des animaux que l’on ne rencontre pas le reste de l’année : visites de parcs animaliers, cirques. Le contact peut être direct avec l’animal mais, plus souvent, c’est l’inhalation des allergènes volatils qui est en cause (chevaux, poneys) à l’origine de conjonctivite, rhinite, toux, urticaire, asthme. • Aoûtats. Petit acarien de couleur rouge (Trombicula automnalis) également appelé rouget. Ses larves vivent à la surface du sol et contaminent l’homme et les animaux à sang chaud. Elles piquent dans les plis de la peau (pli des coudes, des genoux, aisselles) et à l’endroit des élastiques (chevilles, sous-vêtements, ceinture). Au bout d’une heure apparaissent des papules rouges (2-3 mm) entourées d’une auréole plus claire. Elles sont suivies de démangeaisons intenses pouvant persister une semaine. Possibilité de fièvre. Traitement : anti-H1, dermocorticoïdes. • Appâts de pêcheurs. Ils sont très allergisants et nombreux : chironomes, asticots, puces d’eau, vers de vase, responsables de rhinite et de conjonctivite, surtout si le pêcheur se frotte le nez ou les yeux après la fixation de l’appât ! Les autres symptômes sont la toux, l’asthme et l’urticaire (2,3). Pièges réciproques : le rhume des foins (allergie pollinique) au cours d’une partie de pêche par beau temps et l’allergie aux appâts de pêcheur. • Anaphylaxie induite par l’ingestion d’aliments et l’exercice physique. (AIIAEP) La prise d’aliments suivie d’un effort d’endurance (course à pied, vélo, natation) peut entraîner en quelques minutes, un prurit palmo-plantaire, une rhinite, puis des symptômes plus graves si le sujet n’arrête pas l’effort (urticaire, bronchospasme, choc) avec menace pour le pronostic vital. Les patients ont des PT positifs et/ou IgEs vis-à-vis d’un aliment, mais ni l’ingestion de l’aliment seul, ni l’effort seul n’entraînent les symptômes. De nombreux aliments sont en cause : fruits de mer, céleri, pomme, pain, pâtes alimentaires (etc.) (4). Prévention : I) respecter la règle des 3 heures entre le repas et l’effort, II) pas de médicaments (aspirine, anti-inflammatoires non stéroïdiens) qui sont des facteurs favorisants. • Caravanes. Le développement d’acariens et de moisissures pendant l’année expose à des symptômes allergiques en vacances. Bien aérer avant le départ en vacances. Utiliser des housses à matelas et les acaricides. Même commentaire pour les tentes restées pliées pendant l’année. • Dermites des prés. Lésions dues à une phototoxicité et une photoallergie surtout chez les enfants lorsque 4 conditions sont réunies : I) peau mouillée par la sueur ou un bain (rivière, piscine), II) contact prolongé avec l’herbe, III) contact avec les psoralènes (substances phototoxiques de ces herbes), IV) exposition solaire. • Effort. Outre l’AIIAEP, l’effort provoque des urticaires cholinergiques, surtout chez l’adolescent et l’adulte jeune. Les lésions, diffuses, sont faites de papules de petite dimension (quelques mm). Les facteurs favorisants sont la peau mouillée (sueurs, bains) et le soleil. • Fourmis. Les morsures de certaines fourmis entraînent simplement un prurit local. Au Sud des États-Unis, en Australie ou en Tasmanie, certaines fourmis sont responsables de réactions aussi sévères que les piqûres d’abeille ou de guêpe (fourmis de feu). Certaines fourmis autochtones entraînent des symptômes loco-régionaux gênants en cas de piqûres multiples. • Herbes. Plusieurs cas d’anaphylaxie sont survenus chez des enfants courant dans de hautes herbes (5,6). Les responsables sont des allergènes non polliniques des tiges. L’allergène, identifié au cours de l’anaphylaxie au jus de pelouse (7,8), est la sous-unité L de la RubisCO (Ribulose 1,5 bisphosphate carboxylase/oxygénase), enzyme principale sur terre*. Les facteurs aggravants sont l’effort, les écorchures ou les plaies qui favorisent la pénétration des allergènes. *RubisCO. https://fr.wikipedia.org/wiki/Rubisco (consulté le 30 juillet 2021). • Hyménoptères. Les hyménoptères (> 200 000 espèces) sont nombreux : abeilles, bourdons, guêpes, frelons, taons, fourmis (9-11). Les abeilles et les guêpes provoquent des réactions allergiques IgE-dépendantes parfois graves, pouvant mettre la vie en danger. On distingue facilement les piqûres d’abeilles qui laissent leur aiguillon dans le derme (aiguillon crénelé) de celles des guêpes qui retirent leur aiguillon lisse après la piqûre. Toute piqûre provoque une douleur très vive, puis en quelques heures une inflammation locale. Les symptômes sont plus graves en cas de piqûres multiples. On estime que plus de 500-1 000 piqûres peuvent entraîner le décès. Traitement : I) inactiver le venin en plaçant une source de chaleur (bout d’une cigarette incandescente) à 1-2 cm de la piqûre de façon à produire une chaleur de 50

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